Qu’est-ce que l’Accord économique et commercial global (AÉCG)?
C’est l’accord commercial le plus important jamais négocié par le Canada avec la première puissance commerciale au monde, l’Union Européenne.
- Cet accord inclut les marchés publics, les services publics, l’environnement, l’investissement, l’agriculture, les droits de propriété intellectuelle, la mobilité de la main-d’œuvre, la culture et l’origine géographique des produits.
- Pour la première fois, les provinces sont invitées à la table des négociations. Les secteurs sous leur juridiction sont donc en jeu.
Pourquoi un accord commercial entre le Canada et l’Union européenne alors que les relations commerciales entre ces deux partis sont très bonnes et en progression?
- Pour faciliter les opérations des compagnies multinationales, même si celles-ci sont déjà très puissantes et que certaines d’entre elles sont même considérées comme «trop grosses pour mourir»..
- Pour dérèglementer, même si la dérèglementation a été la principale cause de la crise économique de ces dernières années.
- Par choix idéologique, le libre-échange étant vu comme bon pour l’un et l’autre parti. Pourtant, ces raisons sont très discutables et aucun véritable bilan sur les effets du libre-échange n’est venu prouver son efficacité.
Qui est notre partenaire européen?
- L’Union européenne. Celle-ci est fondée sur le principe de la concurrence libre et non faussée, ce qui implique que les monopoles d’État ne sont pas acceptés et que les services publics fournis sur une base commerciale doivent être privatisés. Dans les pays membres de l’Union européenne, plusieurs services sont déjà privatisés comme: les télécommunications, les transports, l’eau, l’énergie, les autoroutes et de larges pans du secteur de la santé. De plus, suite aux plans d’austérité adoptés dans les pays européens, le rôle de l’état est encore plus réduit.
Qui négocient et comment se font les négociations?
- Les négociateurs canadiens sont reliés au Ministère du Commerce international. Ils nous ont très mal desservis dans le passé : l’ALÉNA et l’accord Buy American ont été négociés à notre désavantage.
- Les provinces sont invitées à la table des négociations sur les sujets qui les concernent exclusivement.
- La Commission européenne, non élue et largement infiltrée par les lobbies des grandes entreprises, négocie pour les Européens.
Neuf raisons de s’inquiéter de l’Accord économique et commercial global (AÉCG)?
- L’AÉCG est négocié dans un manque total de transparence : les négociations se déroulent en secret. La société civile n’est pas consultée, à l’exception des gens d’affaires. Il serait pourtant essentiel qu’un accord aux conséquences si larges soit l’objet d’un important débat public.
- L’AÉCG inclura une disposition de « protection des investissements » qui permettra aux entreprises de poursuivre les États: calqué sur le modèle du chapitre 11 de l’ALÉNA, l’AÉCG devrait inclure un chapitre sur l’investissement qui permettra à une entreprise étrangère de poursuivre un gouvernement si une réglementation la prive de profits anticipés. Ce qui porte directement atteinte à la démocratie.
- L’AÉCG entraînera une ouverture des marchés publics au profit des multinationales européennes : une ouverture des marchés publics obligera de choisir les contractants principalement en fonction du plus bas coût et ne permettra plus de favoriser dans les appels d’offre les entreprises qui contribuent au développement local, à la protection de l’environnement, et qui offrent des emplois de qualité.
- L’AÉCG favorisera la privatisation de l’eau : Une ouverture des marchés publics de l’eau permettra à de grandes compagnies européennes, comme Veolia et Suez, de répondre à des appels d’offre des municipalités de plus en plus nombreux, nécessité par d’importants travaux à venir et encouragés par une politique fédérale favorable aux partenariats public-privé.
- L’AÉCG sera dommageable pour l’environnement : la combinaison de l’ouverture des marchés publics et de la disposition sur l’investissement rendra la protection de l’environnement plus difficile : celle-ci ne pourra plus être un critère d’attribution de contrats publics; et la disposition sur l’investissement permettra aux entreprises de contester les lois environnementales.
- L’AÉCG pourrait prolonger la période d’exclusivité des brevets de médicaments : la protection des droits de propriété intellectuelle, telle que négociée dans l’AÉCG, pourrait retarder la mise en marché de médicaments génériques, ce qui haussera de façon marquée les coûts de notre système de santé.
- L’AÉCG n’épargnera pas le secteur de la santé : par les nombreux marchés publics de ce secteur qui devraient être ouverts au capital européen, par une ouverture probable du secteur de l’assurance, par la mobilité de la main-d’œuvre qui pourrait rendre accessible les permis de pratiques aux Européens, les multinationales européennes aguerries dans l’accaparement des biens et services publics au profit de leur intérêt privé s’implanteraient plus facilement ici et profiteraient d’un marché de moins et moins public, très rentable.
- L’AÉCG favorisera l’agro-industrie aux dépens de la souveraineté alimentaire : l’AÉCG pourrait empêcher les agriculteurs de conserver, réutiliser et vendre leurs semences. Il soumettrait les agriculteurs aux géants de l’agro-industrie.
- La culture n’est toujours pas exemptée de l’AÉCG : malgré la convention sur la diversité culturelle, ratifiée par le Canada et l’Union européenne, les négociateurs n’ont pas exclu la culture des négociations, ce qui risque de porter atteinte à la notion même de diversité culturelle — alors que les négociations se déroulent dans une seule langue, l’anglais.
Pourquoi s’opposer à l’AÉCG?
- Parce que cet accord, qui touchera de nombreux aspects de notre vie sociale, économique et culturelle, est négocié sans consultations réelles avec la société civile, pour le seul bénéfice des grandes entreprises.
- Parce que nous jugeons nécessaire que nos gouvernements se servent des marchés publics pour favoriser le développement local.
- Parce que cet accord rendra plus difficile de donner à la population ce dont elle a le plus besoin : des services publics accessibles à tous et un environnement de qualité.
- Parce que cet accord, comme la plupart des autres accords commerciaux, sera très difficilement réversible.
- Parce que cet accord remet profondément en question nos valeurs démocratiques.
Statut actuel de cette entente
En négociation depuis 2009, la conclusion de cet accord a d’abord été annoncée pour décembre 2011, puis décembre 2012, mais on attend toujours, même si sa conclusion n’est pas souhaitable selon nous. Il y a deux choses à dire :
- L’accord n’est toujours pas conclu parce que les négociateurs n’arrivent pas à s’entendre sur les questions agricoles principalement. Les Européens ne veulent pas de notre bœuf ni de notre porc, mais c’est une condition du Canada pour que les Européens augmentent les quotas de fromages qu’ils exportent chez-nous;
- L’accord, même s’il était conclu, ne serait pas acceptable, notamment parce qu’il fait la partie trop belle aux investisseurs étrangers, qui peuvent poursuivre les gouvernements s’ils adoptent des mesures susceptibles de nuire à leur capacité de réaliser des profits. L’intention de poursuivre le gouvernement du Québec par la compagnie Lone Pine Resources en est l’exemple le plus récent. Cette entreprise veut poursuivre le gouvernement du Canada pour 250 millions de dollars en vertu du chapitre 11 de l’ALÉNA, l’Accord de libre-échange nord-américain, parce que le gouvernement du Québec a imposé un moratoire sur l’exploration du gaz de schiste dans le golfe Saint-Laurent