Avec le déclenchement de la campagne électorale fédérale, la CSD, la CSN, la CSQ et la FTQ demandent aux partis politiques fédéraux de prendre position en faveur de neuf revendications prioritaires en matière d’assurance-emploi, un régime qui a grandement besoin d’être bonifié parce que moins de quatre personnes en chômage sur dix réussissent à se qualifier et à recevoir des prestations alors que tout le monde paye des cotisations pour être couvert en cas de perte d’emploi.
Selon Serge Cadieux, secrétaire général de la FTQ, « l’abolition de la norme variable d’admissibilité va faire en sorte de faire taire ceux qui disent que la majoration du nombre de semaines de prestations liée au taux de chômage régional avantage les régions de l’est du pays ».
« Le prochain gouvernement doit limiter les exclusions pour refus d’emploi à six semaines. Presque la moitié de la population n’a pas la capacité de faire face à ses obligations financières. Imposer un maximum de six semaines de pénalité est dans un tel contexte constitue une peine significative », affirme Luc Beauregard, secrétaire-trésorier de la CSQ.
« Selon nous, chacun des partis politiques peut dès maintenant s’engager à corriger une situation qui pénalise actuellement presque exclusivement les femmes, parce que ce sont elles qui prennent la grande majorité des prestations de maternité, parentales et pour soins aux proches. Présentement, une personne qui perd son emploi avant, pendant ou après la prise d’un congé de maternité ou parental n’est souvent pas admissible aux prestations d’assurance-emploi ou alors pour très peu de temps, parce que les semaines de prestations spéciales — c’est ce que sont les prestations de maternité et parentales — sont considérées comme des prestations régulières », d’expliquer Luc Vachon, président de la CSD.
« Il faut impérativement ramener le taux de remplacement de l’assurance-emploi à 60 %. On en a les moyens ! Le Canada, avec l’Autriche et les États-Unis, est en queue de peloton des pays de l’OCDE offrant le plus faible taux de remplacement du revenu », rappelle Jean Lacharité, 2e vice-président de la CSN.
Le but de toute politique sociale est de viser à « garantir la dignité humaine », favoriser l’insertion sociale et son corollaire, réduire l’exclusion sociale, tout en réduisant la pauvreté et en favorisant la cohésion sociale.
Le régime d’assurance-emploi doit être vu comme un bien social et non comme un simple instrument de politique économique et financière. En ce sens, nous invitons les partis politiques fédéraux à se prononcer en faveur des neuf propositions faisant consensus entre les quatre centrales syndicales québécoises.
Les neuf propositions des organisations syndicales :
1. Norme d’admissibilité au régime
Nous demandons une norme hybride d’admissibilité, une en heures de travail et une en semaines de travail, celle étant la plus profitable au prestataire ou à la prestataire s’appliquant. Chaque versant de la norme hybride est une norme unique d’admissibilité au régime : 420 heures ou 12 semaines de travail assurables.
2. La durée de la période de prestations et le calcul de la prestation
Nous demandons l’abolition de la norme variable d’admissibilité ou NVA, qui fait en sorte que, plus le taux de chômage régional est élevé, moins le nombre d’heures d’emploi assurable requis est grand.
3. Limiter les exclusions pour départ volontaire ou perte d’emploi pour inconduite à un maximum de 6 semaines selon les circonstances de la fin d’emploi ; aucune exclusion ne doit être reportée à une période subséquente de prestation
Nous demandons de ramener la période d’exclusion pour refus d’emploi convenable ou pour défaut d’avoir profité d’une occasion d’emploi qui est actuellement de 7 à 12 semaines, à un maximum de 6 semaines. De plus, nous voulons faire annuler la possibilité de report sur une prochaine demande de prestations si la personne n’a pas servi la totalité desdites semaines d’exclusion à moins qu’elle ait retravaillé 700 heures pour se requalifier.
4. Conflit collectif
Nous demandons de prolonger la période de référence et la période de prestations en raison d’une grève ou d’un lock-out, selon la durée du conflit, à moins que la personne visée par l’inadmissibilité se requalifie avant la fin du conflit, et ce, afin de permettre à celles et ceux qui ne peuvent reprendre le travail à la suite d’un conflit d’être admissibles aux prestations d’assurance-emploi.
5. Prestations spéciales
Nous demandons de prolonger la période de prestations afin de permettre de recevoir les prestations spéciales sans affecter les prestations régulières auxquelles la personne s’est qualifiée.
Nous demandons aussi l’élimination des catégories sous condition de l’adoption de nouveaux critères d’admissibilité. Nous proposons de prolonger les prestations de maladie à 35 semaines.
6. Abolir le délai maximal de 52 ou 104 semaines pour recevoir les prestations
Nous demandons que l’on abolisse les dates butoirs pour recevoir ses prestations au sein du régime, soit celle de 52 ou 104 semaines. Ainsi, une personne, après avoir subi l’étalement de la somme reçue au moment de sa cessation d’emploi et qui n’aurait pas trouvé un nouvel emploi, pourrait toujours se prévaloir de son droit à des prestations.
7. Rehausser le maximum de la rémunération assurable
Nous demandons d’augmenter ledit maximum en fonction de la majoration existante jusqu’en 1996, soit à 140 % de la rémunération hebdomadaire moyenne annualisée, ce qui correspondrait à 74 300 $ en 2019, comparativement à 53 100 $ actuellement.
8. Augmenter le taux de remplacement à au moins 60 % du maximum de la rémunération assurable
Rappelons que le taux de remplacement du revenu n’est qu’à 55 % depuis 1994. Depuis la création du régime d’assurance-emploi, il a presque toujours été plus élevé que ce taux. Par exemple, il a été de 66,67 % de 1971 à 1979, puis de 60 % de 1979 à 1993. Malheureusement, le Canada, à l’instar de l’Autriche et des États-Unis, se situe en queue de peloton des pays de l’OCDE offrant le plus faible taux de remplacement du revenu.
Réviser le financement et la gouvernance du régime
- Maintenir la répartition actuelle entre les contributions des salariés et celles des employeurs.
- Rétablir une contribution du gouvernement au financement du régime.
- Dans la mesure où une caisse autonome serait instaurée, la portion du régime financée en tout ou en partie par le fonds consolidé du revenu ne pourrait vraisemblablement être financée en même temps par les fonds en provenance de cette caisse autonome.
- Financer les autres mesures du programme d’assurance emploi par les fonds en provenance d’une caisse autonome (fonds en fiducie), laquelle serait alimentée par cotisations des employeurs et des travailleurs, selon la répartition actuelle 7/12 et 5/12. Prévoir dans le mécanisme de fixation des cotisations l’objectif de constituer une réserve de stabilité de la caisse de 10 à 15 G$.
- Prévoir un organisme tripartite (gouvernement, employeurs, travailleurs) ayant la responsabilité de fixer le taux de cotisation, de gérer le patrimoine fiduciaire de la caisse autonome et éventuellement de définir la portée du régime.