Déceptions et fausses économies, selon la CSD
Montréal, le 26 mars 2015 – L’absence de consultation et de dialogue avec les partenaires sociaux semble devenir la marque de commerce de ce gouvernement qui n’en a que pour l’atteinte du déficit zéro à tout prix. Par exemple,
« jamais le relèvement du seuil d’assujettissement à la Loi du 1 % d’un million à deux millions de dollars n’a été présenté ni discuté à la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT) alors que c’est le forum où ce genre de décision devrait être au minimum soumis aux partenaires »
d’expliquer François Vaudreuil, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD).
De plus, nous avons été parmi les nombreuses voix qui ont demandé au ministre Leitao de ne pas mettre en œuvre à la pièce les recommandations de la commission Godbout d’examen de la fiscalité québécoise parce que la réforme qu’elle propose appelle à un débat public élargi, au-delà du cercle des experts qui ont concocté le rapport, aussi compétents soient-ils. Or, si on a échappé à une hausse de la TVQ, il appert que cette mise en œuvre à la pièce est commencée avec la réduction de l’impôt des sociétés qui, selon le discours du budget, va permettre de stimuler les investissements des entreprises. Or, cette prémisse est loin d’être prouvée.
« Ça fait de nombreuses années que l’impôt des sociétés baisse au Québec et les entreprises n’ont pas investi pour autant. En fait, au Québec, l’investissement a même baissé pendant que l’épargne, voire la sur épargne des entreprises explosait. Les entreprises non financières, plutôt que d’investir, ont accumulé des actifs liquides considérables »
d’expliquer le président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), François Vaudreuil. Estimés en 2013 à 604 G$ pour le Canada (soit 32 % du PIB) et à près de 100 G$ pour le Québec (soit environ le quart de son PIB), ces actifs liquides n’ont ni été versés aux actionnaires ni investis dans les entreprises, ils constituent un véritable trésor sur lequel les entreprises s’assoient plutôt que d’alimenter le cercle vertueux de la croissance. Pire, selon la revue The Economist, un tel taux d’épargne pourrait avoir un impact négatif sur la croissance parce que la demande totale est en diminution, faute d’investissements, justement.
Des fusions d’organismes inutiles, voire nuisibles
Après Raymond Bachand, c’est au tour de Carlos Leitao de s’essayer au jeu des fusions d’organismes, sous prétexte de faire réaliser des économies au gouvernement. Faux prétexte quand on sait que deux des trois organismes fusionnés, la Commission des normes du travail (CNT) et la Commission de la santé et de la sécurité au travail (CSST), sont entièrement financés par des cotisations patronales et non par les impôts des contribuables. De plus, les trois organismes (le 3e étant la Commission de l’équité salariale) ont des missions, des méthodes de travail et des modes de financement tellement différents qu’on ne peut logiquement croire qu’il y a des économies à faire à les regrouper.
« Pire, l’expertise développée au sein de chacun des organismes pourrait se perdre dans un tel processus de fusion si la volonté d’harmoniser les pratiques prend le dessus, ce qui laisserait les travailleuses et les travailleurs beaucoup moins bien protégés qu’ils ne le sont à l’heure actuelle »
de poursuivre François Vaudreuil.
Le gouvernement semble avoir oublié que de tenter de toucher à la Commission de l’équité salariale (CÉS) est périlleux. Il y a quelques années, sous prétexte que l’équité salariale était atteinte, le gouvernement Charest avait voulu dissoudre la CÉS et confier sa mission d’assistance et de « conformité » des milieux de travail à la Loi à une section à créer au sein de la CNT et, devant le tollé, il avait été forcé de reculer. « Ce sera encore le cas cette fois-ci » prédit François Vaudreuil.
Pour ce qui est du regroupement de la Commission des lésions professionnelles (CLP) et de la Commission des relations du travail (CRT), il n’y a pas là non plus d’économies à faire pour le gouvernement puisque la CLP est entièrement financée par les employeurs. Encore ici, la perte d’expertise et le nivellement des pratiques sont à craindre.
Un plan de relance entièrement financé par des coupes budgétaires
Si certaines mesures de stimulation de l’investissement paraissent intéressantes (par exemple, la prolongation du crédit d’impôt à l’investissement relatif au matériel de fabrication et de transformation pour les régions, qui lie directement investissement et économie d’impôt), on ne peut s’empêcher de constater que le financement de ces mesures se fait en coupant dans des dépenses de programmes ailleurs, à cause de la règle du cran d’arrêt qu’applique le gouvernement Couillard pour arriver au déficit zéro.
« Financer les mesures de stimulation économique au dépens d’autres missions importantes de l’État nous apparaît, à la CSD, de très mauvais aloi. Le gouvernement aurait pu financer ces mesures autrement s’il retardait l’atteinte du déficit zéro d’un an ou s’il ne versait pas 1,6 G$ dans le Fonds des générations »,
a déclaré François Vaudreuil.